The Expanse – tome 2 – La guerre de Caliban – James S.A. Corey

Un second tome dans la lignée du premier, au moins aussi haletant, avec des personnages plus subtils, mais plus prévisible

caliban

Ce second tome de la série « The Expanse » reste dans la droite lignée du premier, à la fois en terme de qualité, de style de narration (polyphonique, même si ici ce sont quatre voix et non plus deux qui alternent à chaque chapitre pour nous montrer l’histoire) et de structure. C’est peut-être là d’ailleurs qu’on peut émettre une certaine critique, car la structure de l’intrigue est calquée trait pour trait sur celle du premier tome : un événement mystérieux à lieu au début, on nous présente les protagonistes ensuite (sauf Holden, que nous connaissons déjà), ces personnages se retrouvent impliqués dans l’intrigue chacun de leur côté, ils finissent par se rejoindre (comme Miller et Holden dans le premier) pour rechercher la même fille qui a disparu (sauf qu’ici c’est une fillette et pas une femme adulte comme dans le premier tome), il y a des scènes d’horreur, une grande castagne avec les créatures de la protomolécule, et un épilogue. Bref, ce copier-coller pourra gêner certains, même si les qualités d’écriture du roman font passer bien des pilules.

Ecriture, influences & personnages

J’ai trouvé le roman mieux écrit que le premier tome, non pas que le premier ait eu un style pauvre, mais j’ai simplement trouvé que La Guerre de Caliban était un cran au-dessus. Cela se ressent notamment au niveau des personnages : si deux des trois nouveaux restent très stéréotypés (Bobbie, la beauté Martienne, marine d’élite, et Prax, le père-courage et scientifique pédant), ce n’est pas le cas du troisième, Chrisjen, éminence grise des nations unies beaucoup plus subtile, dans sa caractérisation, que les autres. De plus, Holden a évolué, passant du capitaine sans peur et sans reproche à un commandant qui n’est plus sans peur et qui n’est plus non plus sans reproche. Le personnage est moins caricatural, plus subtil, plus torturé aussi, et c’est tant mieux. Signalons qu’Amos reste toujours aussi dur à cuire et à l’humour ravageur, pour le plus grand plaisir du lecteur.
Toujours au niveau de l’écriture, les auteurs (rappelons que James S.A. Corey n’est que le pseudonyme commun de deux écrivains, dont l’un est l’assistant de George R.R. Martin -le Trône de Fer-) gardent les fortes influences du premier tome (Peter F. Hamilton, Kim Stanley Robinson, Greg Bear, Alastair Reynolds), en ajoutant une forte dose d’Alan Dean Foster dans le mélange cette fois-ci. Si vous avez lu ses novélisations ou vu n’importe lequel des quatre Alien, certaines scènes ou situations vont vous rappeler fortement quelque chose. Disons que la Weyland-Yutani et ses projets de militarisation des aliens ne sont jamais très loin. L’influence de G.R.R. Martin, qu’on nous présentait comme manifeste dès le premier tome, et qui n’y était (du moins pour moi) pas franchement sensible est ici bien plus manifeste : c’est le cas pour la narration polyphonique (à quatre voix, ça ressemble à la fois au Trône de Fer -dans une certaine mesure- et encore plus à du Peter F. Hamilton), mais aussi pour les créatures de la Protomolécule, qui commencent à ressembler furieusement aux Marcheurs Blancs.

Pour finir sur le chapitre écriture, même s’il n’y a plus l’effet de surprise du premier tome, et que le lecteur sait déjà pour la protomolécule, l’écriture réussit à être encore plus haletante dans ce second tome, chaque fin de chapitre donnant une envie furieuse de ne pas poser le livre et de vite lire le suivant. Chaque personnage fait rebondir l’intérêt, dans son propre chapitre, au profit du personnage suivant qui va reprendre le flambeau de la narration. C’est du moins le cas dans les trois premiers quarts du roman, après par contre, ça retombe un peu. La faute à une histoire qui, cette fois, est un peu trop prévisible, les rebondissements se voient arriver des centaines de pages avant. Ce qui pourrait être un très mauvais point si, comme je l’ai précisé, l’écriture n’était pas aussi haletante. Après tout, vous savez que le Titanic va couler, mais ça ne vous empêche pas d’avoir le souffle court quand les protagonistes du film sont menacés, non ?

Esthétique

Pour finir, une petite remarque esthétique (un aspect auquel je suis très sensible) : la couverture, outre une illustration sans aucun intérêt (elle ne me renseigne pas vraiment sur le thème du livre) et sommaire, présente l’assemblage de couleurs le plus improbable (un mauvasse et un moutarde fluo) et du plus mauvais goût que j’ai jamais vu (c’est encore pire « en vrai » que sur l’illustration sur la page produit d’un quelconque site marchand). Chères éditions Actes Sud, je pense qu’il va falloir faire un petit effort à ce niveau là, je n’achète pas forcément un livre à sa couverture, mais disons qu’avec ce genre de couverture, le contenu à intérêt à être sacrément bon si vous voulez que j’achète le troisième tome.

En conclusion

Si vous avez aimé le premier tome, vous pouvez acheter le second les yeux fermés, pas de changement majeur de thème, de qualité ou de style de narration, même si la qualité d’écriture est un peu supérieure et que globalement, les personnages sont un peu plus subtils (même ce gros bourrin d’Amos acquiert plus d’épaisseur). Globalement, la série The Expanse se révèle être un très bon cycle de Space-Op mâtiné d’Horreur, dans la droite lignée de Peter Hamilton et de Alien. Par contre, sachez-le, car cela peut être un problème pour certains, la structure de l’intrigue du tome 2 est calquée sur celle du tome 1, et l’intrigue du 2 est beaucoup plus prévisible que celle du 1. Malgré cela, je conseille sans réserve, le (New) Space-Op, noyé dans la bit-lit et la dystopie de bas étage, est déjà suffisamment rare pour qu’un bon Space-Op mâtiné de bon post-apo soit un trésor sans prix.

Pour aller plus loin

Si vous souhaitez avoir un autre avis sur ce roman, je vous conseille la lecture des critiques suivantes : celle de Shaya, celle de Lorhkan, celle de Lutin

Ce livre est le second d’un cycle : retrouvez sur Le Culte d’Apophis la critique du tome 1, du tome 3, du tome 4, du tome 5, du tome 6, du tome 7,

12 réflexions sur “The Expanse – tome 2 – La guerre de Caliban – James S.A. Corey

  1. Ping : Bilan 2015 : Tops et flops – Le culte d'Apophis

  2. Ping : The Expanse – Tome 1 – L’éveil du Léviathan – James S.A. Corey | Le culte d'Apophis

  3. Je viens d’écrire ma critique et par curiosité je suis passée voir la tienne…. Je ne peux pas dire « copieur »! 😉 Toute ressemblance est fortuite, et c’est là que je m’aperçois que nous avons des attentes similaires ainsi qu’une vision de la SF.
    (Le publication est programmée pour ce soir)

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    • Ce qui est très pratique parce que chacun de nous peut lire les critiques de l’autre sur un bouquin qu’il ne possède pas (encore) et être quasi-certain de savoir si le livre en question va lui plaire… ou pas ! Bref, chacun de nous fait soit dépenser, soit économiser, des sommes folles à l’autre 😀 Faudrait nous faire rembourser nos achats de livres par la Sécurité Sociale, on évite bien des frustrations aux gens qui ont les mêmes goûts que nous 😉

      Sinon pour ma part, il y a une petite chance que ma chronique de Club Uranium paraisse ce soir (ça dépendra de Wimbledon), mais à mon avis c’est plus pour demain midi ou soir.

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  4. Ping : La guerre de Caliban – James SA Corey – Albédo

  5. Ping : The Expanse – tome 3 – La porte d’Abaddon – James S.A. Corey | Le culte d'Apophis

  6. Ping : Les feux de Cibola – James S.A. Corey | Le culte d'Apophis

  7. Ping : Les jeux de Némésis – James S.A. Corey | Le culte d'Apophis

  8. Ping : Les cendres de Babylone – James S.A. Corey | Le culte d'Apophis

  9. Ping : Le soulèvement de Persépolis – James S.A. Corey | Le culte d'Apophis

  10. J’ai été étonné en lisant l’anecdote sur l’assistant de GRR Martin, je ne savait pas que cela existait !
    Autant dans la bande dessiné je vois assez bien l’utilité mais je veux bien des explications sur le rôle d’un assistant d’écrivain (sur internet je n’ai trouvé la mention que de rôle administratif).
    Merci !

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    • Pour ce que j’en sais, liaison avec les médias, réunion de documentation, et plus généralement tout ce qui fait que l’écrivain peut se concentrer sur son écriture au lieu de réserver des places d’avion ou des chambres d’hôtel.

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